On dit souvent que la RSE coûte cher et qu’elle ne rapporte rien. Les cabinets de conseil poussent comme des champignons à l’automne et facturent des dizaines d’heures d’analyses, d’audit et de formations techniques à prix d’or que l’entreprise justifiera comme ayant mis une démarche RSE en place. Mais qu’est-ce qui change à l’arrivée ? Presque rien. On s’inspire du best seller de Mark H. McCormack, célèbre homme d’affaires américain, pour vous donner des axes pragmatiques de succès RSE.
Le célèbre homme d’affaires McCormack publiait il y a plusieurs années le guide : « What they don’t teach you at Harvard Business School » ; que l’on pourrait traduire par « Ce que vous n’apprenez pas à l’école de Commerce de Harvard ». Devenu un bestseller dans le monde, il se vend toujours à plusieurs milliers d’exemplaires par an. Il reprend les fondamentaux : maîtriser les relations humaines conduit davantage au succès d’une entreprise que de définir des KPI à tout prix. A une époque où les tensions sociales se multiplient, les clés de McCormack pourraient donner un avantage compétitif à tout dirigeant ou service RH.
Le principe de la RSE prônant le respect des autres et le bon sens dans les affaires, il semblait important de remettre ces notions fondamentales au centre des décisions stratégiques avant d’acheter une table de ping-pong pour sa salle de repos.
1. Rappelez à vos équipes de rester courtois en toutes circonstances
Que celui qui n’a jamais eu affaire à une agression verbale ou physique au travail sans explication se manifeste en commentaire. Il nous est arrivé à tous de recevoir une réponse acerbe lors d’une réunion, d’un coup de fil ou par mail. Sans que cela soit justifié d’ailleurs. Pour certains, des coups ont même été reçus. Selon l’Organisation Internationale du Travail (OIT) en 2021, 1 personne sur 5 dit avoir subi une forme de violence au travail dans le monde.
Selon France travail, les agressions et incivilités envers les agents ont augmenté de 12% en 2023 par rapport à 2022. Plus édifiant encore, une enquête de Qualisocial et IPSOS en 2022 auprès de 2000 salariés révèle que les relations au travail se dégradent et deviennent un sujet prioritaire :
- 62% jugent que les situations de harcèlement au travail sont plus répandues qu’il y a une dizaine d’années.
- 1 salarié sur 3 dit avoir été victime de harcèlement
- 1 manager sur 3 a le sentiment d’en avoir été l’auteur
Selon l’enquête de Eleas :
- 42% des salariés sont exposés aux incivilités
- 33% en sont affectés personnellement et en souffrent
- Pour 54% des salariés les incivilités sont le fait des publics extérieurs à l’entreprise
- Pour 48%, elles sont le fait de collègues de travail
- 75% des salariés déclarent que ces comportements affectent leur productivité
- 77% des salariés déclarent que ces comportements affectent leur santé.
Pour McCormack, les réactions humaines en disent long sur la personne. Montrer sa colère, sa nervosité ou sa mauvaise foi sont autant d’aveu de faiblesses qui pourront être utilisées contre la personne et renvoient une image négative de l’entreprise. Pour lui, l’importance d’écouter avant de parler et de garder le contrôle de soi-même en toutes circonstances en dit long.
« Lors de situations défavorables, l’attitude de l’autre partie - ou sa façon de gérer la crise – m’a donné envie de retravailler avec lui. Et cette envie de collaborer a souvent mené à des opportunités qui ont porté leurs fruits par la suite ».
Pour McCormack, les réactions et les qualités humaines sont des atouts qui permettent de facturer davantage et surtout de créer des liens durables générant des contrats dans la durée. Pour lui, le dirigeant doit montrer l’exemple en premier lieu.
Cette volonté d’excellence relationnelle pousse les organisateurs du célèbre World Economic Forum à recruter essentiellement leurs équipes auprès de l’école hôtelière de Lausanne dont la philosophie est : « un savant mélange de pensée autonome, de respect, d'empathie et d'attention aux autres”, comme on peut le lire sur leur page d’accueil.
Comme pour l'hôtellerie de luxe, apprenez à vos équipes à s’adresser aux autres avec courtoisie et élégance, en toutes circonstances.
2. Exigez de vos salariés qu’ils répondent à leurs mails
Dans son ouvrage, McCormack insiste sur l’importance d’être vigilant sur les détails et dans sa relation aux autres. Pour lui, apporter une réponse est indispensable pour garantir sa réputation, fidéliser les clients et en attirer de nouveaux.
Lors de ma première expérience en tant que jeune professionnelle à New York City en 2007, je me souviens avoir eu un « clash des cultures ». Ayant fait des stages dans des grandes structures françaises avant, on m’avait appris à ignorer les mails, ou à répondre plusieurs jours après pour « donner indirectement un sentiment d’importance » et établir une relation de pouvoir vis-à-vis de l’autre.
En recevant les premiers mails dans la ville qui ne dort jamais, j’ai donc naturellement posé la question à mes managers : « combien de temps dois-je attendre avant de répondre à mes mails et dans quelles circonstances dois-je établir ce fameux rapport de force en ne répondant pas ? »
J’aurais pu aussi bien demander « à quelle heure mange-t-on les enfants aux Etats-Unis ? » J’ai lu l’horreur dans leur regard – qu’ils ont par ailleurs contenu avec professionnalisme. Leur réponse a été sans appel : « Tu DOIS, en TOUTES CIRCONSTANCES répondre à tes emails. Si tu as la réponse, tu réponds dans l’heure. Si tu n’as pas la réponse, tu réponds dans l’heure en disant que tu vas trouver la réponse dans les 24h. Et dans les 24h tu renvoies un email avec les éléments demandés ». C’était l’époque de la naissance des smartphones et des « crackberry ». Inutile de dire que leur réaction d'épouvante spontanée a laissé une empreinte indélébile que je m’efforce à tout prix de respecter depuis.
Cette habitude professionnelle est un phénomène qui varie largement d’une culture à l’autre. Personnellement, la meilleure qualité de réponses aux mails que j’ai pu observer était indubitablement aux Etats-Unis. Suivi par l’Angleterre, les pays d’Europe du Nord, l’Inde et la Turquie. Personnellement, la France figurait parmi les mauvais élèves (avec des articles de presse incitant à ne pas répondre) ainsi que les pays d’Afrique sub-saharienne.
Alors évidemment, vous n’allez pas répondre à une newsletter ou à un mail duquel 50 personnes - dont vous-même - sont en copie. De la même façon, inutile de répondre aux mails commerciaux, sauf si le service ou produit vous intéresse. Mais quand le mail vous est adressé personnellement et que la relation a été établie, il est indispensable d’apporter une réponse dans les délais les plus courts.
Dans son article : 5 raisons de répondre instantanément à ses mails, voici les explications évoquées par CNBC :
- C’est courtois de répondre aux mails et il n’y a rien de plus agaçant que quelqu’un qui ne répond pas
- Vous serez perçus comme fiable, professionnel et organisé
- Cela vous oblige à agir et à vous engager davantage professionnellement au lieu de rester passif
- Un email bref peut vous faire gagner du temps par la suite. Pour aller plus loin, un collègue américain note « je préfère répondre rapidement que je ne suis pas la bonne personne ou pas intéressé dans l’immédiat », plutôt que de recevoir 30 emails par la suite.
- Cela vous permet d’atteindre le « 0 mail » dans la boîte de réception et de vous donner une sensation de bien-être, du travail bien fait au lieu de générer du stress inutile
Afin d’éviter d’agacer les personnes qui pourraient être les plus fiables professionnellement ; apprenez à vos équipes à répondre à leurs mails. Pour aller plus loin, on vous met un article qui vous donne davantage d’éléments sur le sujet. Évidemment, il est en anglais.
3. Apprenez à vos salariés à tenir leurs engagements
Dans son ouvrage, McCormack dédie une section à l’importance de faire ce que l’on dit. « Des promesses sont faites tout le temps, et presque aussi souvent ne sont pas tenues, créant inutilement une impression terrible. Si vous dites que vous allez le faire, FAITES-LE.
Si vous ne pouvez pas le faire, que le faire va vous coûter davantage que rapporter, ou que vous ne voulez pas le faire : NE DITES PAS QUE VOUS ALLEZ LE FAIRE. Éventuellement, trouvez une excuse, mais ne dites pas « je vais essayer » parce que dans le meilleur des cas, cela va donner l’impression que vous avez essayé et échoué.
Si vous dites que vous allez rappeler le lendemain et que vous ne le faites pas, c’est assez pour influencer toute une relation. […]
C’est aussi peu malin de vous mettre dans une situation où vous répondez au nom de votre entreprise quand vous savez qu’il y a une infime possibilité que cela ne se fasse pas. »
Aux Etats-Unis, la parole a valeur de contrat dans la notion juridique du sens. Personnellement, je trouve que cette attitude est bien plus propice aux relations, y compris dans les affaires que ce que j’ai appris en tant que jeune étudiante en droit « les paroles s’envolent et les écrits restent ». Cette idée que l’on peut dire n’importe quoi sans que cela engage, suscite un climat de méfiance de facto et ne valorise pas les individus. Les commentaires sur les sites de notation en ligne reflètent d’ailleurs très souvent positivement le respect des engagements pris verbalement.
Inversement, il y a quelques mois, j’ai été en contact avec un responsable RSE d’une très grande agence française de certification, à sa demande, pour une éventuelle collaboration avec Rate A Company. Nos deux approches sont complémentaires et cette agence est en forte perte de marché. Recommandant les services de cette organisation dans le passé quand l’occasion s’y prêtait, je réponds favorablement à cette invitation au partenariat.
Plusieurs fois, cette personne s’est engagée sur des points professionnels importants, sans jamais tenir ses engagements. Ses lacunes étaient peut-être dues à un défaut de pouvoir décisionnaire ou à un défaut d’organisation. Il a fini par ne plus répondre, très certainement par gêne, ne donnant aucune explication. Cette expérience m’incite à ne plus recommander leurs services, principalement par peur que cette absence de rigueur se retrouve dans la qualité de leurs prestations et ne ternisse ma propre expertise.
4. Savoir avouer ses faiblesses et ses erreurs en entreprise pour améliorer sa performance
Cette anecdote amène au dernier point de McCormack : savoir dire « je ne sais pas », « j’ai besoin d’aide » et « j’ai fait une erreur ». « Ce sont des phrases difficiles à dire que je dis moi-même souvent. En fait, la plupart des grands PDG et dirigeants avec lesquels j’ai travaillé savent le dire quand c’est nécessaire » écrit-il dans son livre.
- Savoir dire je ne sais pas. Selon l’homme d’affaires, savoir dire « je ne sais pas » permet de récupérer des informations, même quand on sait, afin d’enrichir son savoir. Par ailleurs, il note que les personnes qui disent qu’elles savent quand elles ne savent pas sont toujours démasquées, conduisant à des suspicions concernant leurs compétences réelles.
- J’ai besoin d’aide. McCormack note le phénomène de ce qu’il appelle le « Lone ranger » : celui qui va signer un contrat et tout faire tout seul parce qu’il a peur de ne pas recevoir tous les mérites. « Ne pas demander d’aide témoigne d’un manque de vision à long terme et d’une étroitesse d’esprit » écrit-il « demander de l’aide est une façon d’apprendre, d’enrichir ses connaissances et son expertise et de se montrer sa valeur au sein d’une entreprise : ça montre une aptitude à travailler en équipe ». Évidemment, il ne faut pas abuser de cette technique sous peine de passer pour un incapable ou un paresseux. De la même façon, l’auteur note qu’il faut savoir apporter son aide avec toute la bienveillance possible quand un collègue le demande. « Le fait de demander de l’aide et de l’apporter à vos collègues sera noté par tout management un tant soit peu compétent ». Il reprend les notions de Chester Barnard en expliquant que les entreprises les plus performantes ont des profils qui combinent leurs intérêts personnels et les intérêts de l’entreprise. En revanche, «agir sans considération des intérêts de l’entreprise pour ne privilégier que ses intérêts personnels réduit son efficacité et sera remarqué ».
- J’ai eu tort. De nouveau l’approche culturelle varie d’un pays à l’autre. Pour McCormack « si tu ne fais pas d’erreur, c’est que tu n’as pas suffisamment essayé ». Mais il nuance de nouveau en insistant sur la capacité à corriger rapidement la faute. Il note que par expérience, « ceux qui ont le plus de mal à avouer leurs erreurs sont ceux qui sont les moins sûrs de leurs aptitudes ». […] « La capacité de dire « J’ai eu tort » est essentielle pour atteindre le succès car elle est cathartique. Cela permet aux dirigeants talentueux d’accepter la situation et de passer à la suite en ayant appris de ces erreurs. Cela conduira sans doute à un futur grand succès ».
Le saviez-vous ? Pour les américains, la règle “7 Cs” permet d’apprendre à bien communiquer. “7 C” pour (les mots commencent aussi par un C en français, quelle chance): clair, concis, concret, correct, cohérent, complet, courtois. Cet article de Chron vous donne de bonnes bases pour mettre en place la courtoisie au sein de votre entreprise tout comme celui de Maddyness.
Le saviez-vous ? Selon la British School of Excellence, l’étiquette est particulièrement importante dans le monde du travail. Apprendre les règles de savoir-vivre de base déclanche des intéractions positives, améliore la cohésion sociale et le sentiment de bien-être, mais surtout ouvre des portes professionnellement. Alors autant de raisons d’acheter un livre sur les bonnes manières et de commencer à s’entrainer en entreprise.
Le saviez-vous ? Selon le youtubeur franco-japonais Louis-San, expert de la culture nippone, ce qui agace le plus au pays du soleil levant est l’incapacité des français à admettre leurs torts, demander pardon et leur instinct de rejeter la faute. Un sujet qu’il aborde dans plusieurs videos et en particulier celle-ci.